Taught to play the Autoharp

Bouteille à la mer.

J'ai la tête en fatigue accumulée. Les idées s'y entrechoquent comme deux nappes de brouillard sur un même sol. J'ai l'impression que de tirer sur un fil fait sortir une branche de pin et agite tout le reste encore un peu plus, histoire de faire tomber la neige. Je passe d'une idée à l'autre en sautillant de concepts en racines. Ecrire deviens alors une sorte d'acte chirurgical. Inciser avec le titre, écarter d'un sous-titre et drainer l'abcès avec l'article. J'en couvre des pages et des pages et des pages, qui font parfois trois lignes chacunes, comme si la seule idée qu'elle contient prenait trois mots pour être décrite et le reste pour être pensée. C'est un genre de soupape de sécurité qui parfois s'ouvre seule et parfois demande à être ouverte. Une petite pause que je m'accorde dans mes journées pour rouler une feuille pleine de tabac, la mettre en bouteille et jeter la bouteille du haut de la falaise en se demandant quand est-ce que je plongerais. Bien sûr, je n'oublie jamais d'ajouter un petit paraphe avec mon adresse, pour qu'une embarcation curieuse qui passerait par là et trouverait mon billet puisse me répondre. Mais ces gens sont bien au delà de mon horizon, quand bien même ils habiteraient la même falaise que moi. Alors peu importe. Je remplis mes feuilles de tabac et je les jette à la mer, pour m'en débarrasser tout autant que pour voir qui aura la folie d'y répondre. C'est qu'on peut faire des rencontres, comme ça. Entretenir une relation épistolaire. Et puis bon, l'idée marche aussi dans l'autre sens. Il arrive que je descende sur la plage et trouve les cadavres de boissons dont les poissons n'ont pas voulu. Alors, qui sait, enfermé dans la petite maison de mon cerveau, je pourrais répondre ? Mais sans sortir, parce que bon, je vis quand même en reclus, sans jamais inviter qui que ce soit chez moi. La surprise que ce serait, de voir quelqu'un toquer à ma porte et me dire "la réponse du 2 janvier, elle était pour moi. Je suis venue vous voir parce que je me suis dit que c'était bien écrit. Court et précis, mais sur une grande feuille comme s'il fallait plus de place pour penser que pour écrire.".










































---

Qui sait, un jour peut être je toucherais quelqu'un.