Taught to play the Autoharp

5H. J'ouvre les yeux. Le réveil sautille sur place, passant d'un pied sur l'autre. On dirait qu'il danse le rock. J'abats mon poing dessus. Il se tait. Oh douceur.

6H. Un téléphone sonne. C'est le mien. Enfer. J'ouvre un oeil. J'effleure l'écran. il se tait. Victoire. L'humain sur la machine. J'en aurais tant appris à ceux qui combattaient la matrice.
Je roule sur le côté, m'effondre sur le parquet plein d'échardes. C'est devenu un rituel matinal (pré-douche) que d'enlever les bouts de bois dans ma peau.
Je grogne, j'attrape un set de sous-vêtements, le pose sur mon dos et commence mon parcours du combattant, rampant vers la douche à la seule force de mes bras. Paraplégique, c'est dur à vivre.

7H. Fraichement sortie de la douche, un turban sur la tête et une serviette coincée sous les aisselles, je passe dans la cuisine et lance un café. Réveil en cours, veuillez patienter...

8H. Manon viens me tirer la serviette d'une main alors que de l'autre elle tient son doudou. "On fait un gâteau ?"
J'adore ces petits matins au manoir ou l'on peut voir un gamin en pyjama avec ses chaussons lapins, encore à moitié endormi, demander des choses magiques. Elle aurait pu demander une licorne que je lui aurais répondu oui.

9H. Habillée, réveillée. Manon aussi. Tous les ingrédients sont sur la table. On prend chacune son tablier, comme des grandes. Manon a l'air sévère du cuisinier qui ne se laisse pas faire. "Celui qui se décarcasseuh !"
Non mamour, c'est pas les gâteaux celui-là. Même l'intraitable, c'est pas le bon.

Il y a de la farine partout sur la table et le plan de travail. Je trébuche sur un cartable. Et je vois le hall d'entrée. Oups. Ménache.

10H. Branle-bas de combat. l'aspirateur est sorti, le gâteau au four, Manon rangée dans sa chambre. Et puis de toute façon il fallait évacuer les lieux, les cuisiniers en ont besoin pour préparer le repas de midi.

12H. Les cartables, et non pas Manon, sont rangés à leur place. Les chaussures aussi, et la boue qui ternissait les dalles de l'entrée est nettoyée. Il est temps de manger, miam.

13H. J'ai oublié le gâteau dans le four. De toute façon, j'avais un pressentiment quand au gout du "Sauce Barbecue-cahuètes au chocolat-muffin-brownie-super mega giga pain d'épices perdu dans la forêt noire"

14H. Un nouveau gâteau est dans le four, avec son frère, sa soeur et son cousin. Marbré comme la savane de Marjorie. Marjorie et ses couettes qui danse et qui dansent sans arrêt.

15H. Le gâteau est magnifique, il sent bon, il est beau, il est bien, il n'est pas boche. Ni bosch. Sa famille aussi. Ca tombe bien, ils auront disparu dans l'heure.

16H. Tout ces enfants mon dieu combien ils sont nombreux. Heureusement que ça n'arrive qu'une fois l'an. Ca crie, ça piaille, ça hurle dans tous les sens, on dirait une fourmilière qui aurait retrouvé l'usage de la voix.

19H. Les parents qui viennent chercher les leurs. Les affabulations, les politesses, les galipettes.

20H. Je me remonte les manches. Ranchement.

22H. Pourquoi on passe toujours plus de temps a préparer et réparer qu'a profiter des choses ?