Le nom n'est pas l'objet, la carte n'est pas le territoire.
C'est ce qu'on m'a toujours dit.
"- Bon alors elle me trompe ou elle me trompe pas, tu pourrais te décider ?
- Ben, c'est compliqué...
- Compliqué mes feux d'artifice, oui.
- Vous êtes séparés, non ?
- Première fois que j'entends parler de séparation. Mais dis m'en plus, tu as l'air de t'y connaitre mieux que moi dans cette histoire qui concerne mon couple.
- Mais enfin, ça fait deux semaines et quelques !
- Deux semaines que quoi ?
- Que vous êtes séparés ! Séparés c'est plus tromper.
- Encore une fois, je n'ai pas eu vent d'une quelconque séparation.
- Bon écoute, c'est réellement embarrassant la scène que tu me fais. En plein milieu d'un café en plus.
- Moi ? Moi ! Moi je fais une scène ? Vas-tu enfin, oui ou non, me dire ce qui se passe, bougre d'agneau, bique de brebis, raton laveur des bois !
- Je n'arrive pas à croire que tu ne sois pas au courant. C'est quand même sur son profil fac
(r)eb**k."
Je suis sortie après lui avoir claqué le gant sur la joue. Avec ma main dans le gant.
Quand j'ai vu le film non-éponyme, j'étais quasi admirative de la proportion que prenait ce qui avait commencé comme une blague pour tuer le temps. De toutes ces idées qu'on y avait mis, et de toutes ces choses qu'on pouvait y faire. Presque au point d'ouvrir un compte. Et puis je me suis ravisée. Puis j'ai eu souvenir des raisons qui m'avaient retenues : Les dérives auxquelles ont en arrive, manne-dié manne-dié !
Aux siècles passés, on écrivait de longues lettres, puis l'on résolvait l'affront par un duel aux aurores carmines neigeuses. Puis, avec l'avènement du tout au nain Ternette, on écrivit de courts courriers électroniques, secs et sans émotions pour éviter la douleur suintante et les remords crachins. Certains audacieux de l'abrupt ont même adapté la technique aux téléphones mobiles et à leur célèbre courts-messages-système, pensant gagner par là en efficacité. Peu me chaud, tant que je ne suis pas touchée.
Mais ce n'est pas une action boursière. On ne cherche pas la rentabilité, l'efficacité, la rapidité. Ce n'est pas non plus un geste chirurgical, rapide précis et discret. Ni même un feu d'artifice grandiose qui fait trembler les fondations des catacombes dans lesquelles s'ébattent joyeusement ancêtres et descendants à la lueur blafarde de projecteurs enfumés par les herbes exotiques que la justice notre mère aveugle n'a jamais voulu voir.
C'est une horreur sans nom, un charnier, le boulet et les fers du fond des cales qui vous cisaillent les membres et alourdissent vos décisions du tribut de la gloire du fait de faire ça face à face, comme un duel dans les bas-fonds alors que la basse-cour parie sur son coq favori. Les spectateurs rigolards et soulards ont beau cracher leur fiel, c'est un sable boueux plein de sang et de larmes, de sueur et de pisse qui se trouve à nos pieds gelés. Il faut dire que ça aide, lorsqu'on est engoncé dans un manteau de fourrure aussi imposant qu'une armure médiévale aux armoiries délavées et au blason terni tandis que que l'être-autrefois-quelque-peu-apprécié-maintenant-détesté se promène en débardeur-caleçon par moins douze.
Mais changer un mot sur un site internet notoirement connu pour ne jamais avoir reçu ma visite et ne même pas avoir la présence d'esprit de me notifier en quelque sorte que ce soit du changement, ça, je n'avale pas. On me disait qu'il ne fallait jamais coller d'étiquettes sur les gens. Ce n'est pas justement ce qui viens de se passer ? Ne m'a-t-on pas renié mon existence, réduite à une simple vignette sur je ne sais quel endroit visité par je ne sais qui ?
Je suis humaine de toute la force de mes fibres, avec toute la conviction de mes poumons, par toute la rage qui fait trembler mes doigts et malgré tout ce que l'on dira de moi. Je refuse catégoriquement de tout mon être d'être la dernière au courant d'une décision arbritraire unilatérale me concernant. Peu m'importe maintenant les "on aurait peut être pu discuter, si tu m'avais dit ce qui n'allait pas j'aurais pu changer pour toi..." et autres ridicules banalités. Ce qui se passe n'a rien d'une banalité, c'est une monstruosité infâme et sans nom.
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Et pendant qu'ici ma rage je muselle, au Rwanda les Enfants-Soldats.
à 09:39